Par Claude Royer | Porte-parole francophone de la Coalition pour le pont Alexandra.
La Coalition pour le pont Alexandra a pu rallier des élus locaux à son opposition au projet le démolir, et continuer à dénoncer l’improvisation du gouvernement fédéral.
Une décision hâtive prise malgré des avis contraires à l’interne
Le pont est une propriété fédérale gérée par Travaux publics, aujourd’hui affilié à Services publics et approvisionnement Canada (SPAC). Dans un contexte politique priorisant d’augmenter à tout prix la capacité des liens autoroutiers interprovinciaux, le gouvernement décide à la hâte en 2019 de démolir le pont malgré l’opposition d’ingénieurs à l’interne révélée par nos demandes d’accès à l’information.
Le Conseil municipal de Gatineau réagit
Ce n’est que cinq ans après avoir pris la décision de démolir, que SPAC et la CCN prennent enfin la peine de présenter le projet de remplacement aux élus de Gatineau et d’Ottawa.
La présentation du projet de SPAC devant le Conseil plénier du 2 juillet dernier fut un échec retentissant, comme le rapporte le journal Le Droit le même jour. Le conseil municipal de Gatineau n’apprécie pas que SPAC évacue toute discussion de réhabiliter le pont patrimonial. Les élus ont de plus souligné l’incohérence de l’abandon du pont Alexandra alors que le fédéral a fait l’annonce en mai d’investir 40 M$ par année pour assurer la pérennité du vieux pont de Québec, un ouvrage d’acier de plus de 100 ans. En point de presse, la mairesse Marquis-Bissonnette a résumé la position du Conseil voulant que l’option de préserver le pont demeurait l’option préférable jusqu’à preuve du contraire.
Rencontre avec des élus d’Ottawa
SPAC s’est ensuite présenté devant le Comité du patrimoine bâti d’Ottawa le 9 juillet, pour y plaider la soi-disant nécessité de construire un lien autoroutier, en contradiction avec les politiques d’apaisement de la circulation dans la Basse-Ville. Patrimoine Ottawa a pu faire valoir au comité que la structure de plus de 120 ans méritait d’être préservé pour sa valeur historique, à l’exemple d’autres ponts anciens au pays et ailleurs dans le monde. La conseillère Plante co-présidente du comité n’a pas manqué de souligner les connaissances et la validité des arguments des défenseurs du pont Alexandra.
À la suite de ses déconvenues devant les élus municipaux, SPAC a organisé une conférence de presse impromptue le 10 juillet dans la zone sécurisée de la Colline, interdite au public. SPAC affirme alors que le pont doit être démoli, quel que soit son usage futur, en s’appuyant sur un rapport technique biaisé commandé à un tiers sans expérience en conservation patrimoniale et produit, au pied levé, plus de 3 ans après la décision de démolir.
Démembrement du comité d’experts et consultation sur trois options
En 2023, SPAC et la CCN avaient annoncé en grande pompe avoir confié à un comité d’examen indépendant (CEI), sous l’égide l’Institut royal d'architecture du Canada (IRAC), la tâche d’assurer un encadrement professionnel lors de l'élaboration de trois options de design pour remplacer le pont. Le comité devait aussi sélectionner l’option finale. Ce comité de 11 experts de calibre international comptait entre autres Barry Padolsky (OC), architecte bien connu.
Contre toute attente, nous avons appris en octobre dernier que SPAC avait secrètement démembré le CEI avant même que les trois options ne soient annoncées au public. Selon la CCN, les responsabilités du comité sont maintenant assumées « à l’interne », sans justification officielle. Ce revirement démontre encore le manque de transparence et l’improvisation associés au projet de démolition.
La CCN a donc poursuivi son plan de consultations en octobre dernier avec une présentation au public de trois options de remplacement soi-disant « emblématiques» et supposément moins coûteuses que la préservation du pont actuel. Par ailleurs, malgré les questions persistantes, SPAC et la CCN ont refusé de préciser les coûts de ces options de remplacement.
Conclusion
Jusqu’à ce qu’elle obtienne gain de cause, la Coalition continuera ses demandes auprès du gouvernement actuel ou futur à reconsidérer la décision de démolir le pont Alexandra, un monument de grande importance dans notre histoire et notre paysage. De plus, la Coalition encourage tous à contacter leurs associations civiques et leurs élus à faire part de leur désir de préserver ce joyau de notre patrimoine. Les élections fédérales à venir en seront la parfaite occasion!