50. Pavillon Aberdeen

Construction :  1898 | Restauration : 1993

Architectes :  Moses Chamberlain Edey | Restauration : Julian Smith & Associates

Emplacement : 1015, rue Bank, Ottawa

 

Le pavillon Aberdeen a été construit dans le parc Lansdowne en 1898, pour l’Association de l’Exposition du Canada central (AECC).  Il reflétait le sérieux des expositions agricoles du 19e siècle, tout en évoquant l’esprit festif d’une visite à un champ de foire.  Il est un des rares survivants au Canada des halls construits expressément pour des expositions de produits agricoles, de bétail et de biens manufacturés à la fin de l’ère victorienne.

Cette œuvre de l’architecte d’Ottawa Moses Chamberlain Edey (1845-1919) s’inscrit dans la lignée des grandioses halls d’exposition de l’époque, inspirés par le célèbre Crystal Palace de Londres, construit en 1851.

Construit en deux mois à peine avec des fermes légères en acier préfabriquées dans les usines de la Dominion Bridge Company à Lachine (Québec), le pavillon a une portée de 40 mètres, une hauteur de 22 mètres et une longueur de 94 mètres.  Un lanterneau à toit en pignon fait toute la longueur du toit convexe.  Un énorme dôme octogonal domine visuellement l’ensemble.  Des détails classiques se retrouvent sur les élévations latérales et à chaque extrémité. Il y a des entrées ornementées en saillie, de grandes fenêtres palladiennes et des tourelles d’angle.  Le tout est recouvert de métal pressé bosselé et de verre, et est embelli par un assortiment fantaisiste de guirlandes, de têtes d’animaux et de bannières embouties préfabriqués par le Pedlar People Limited fabricant d’Oshawa.

Le pavillon Aberdeen a ouvert à grande fanfare en septembre 1898 et a été inauguré par le gouverneur général lord Aberdeen, un fervent partisan du mouvement de la foire agricole.

Entre son ouverture et le début de la Première Guerre mondiale, le pavillon Aberdeen sera temporairement utilisé comme école d’équitation pour la compagnie Strathcona’s Horse avant qu’elle ne parte pour Pretoria et la guerre des Boers.  On y aménagera aussi une patinoire (sur laquelle les premiers Sénateurs d’Ottawa ont gagné la Coupe Stanley en 1904).  Pendant la Grande Guerre, il servira de centre de recrutement pour le Régiment d’infanterie légère Princesse Patricia, comme étape préalable au camp de formation de Valcartier.

Le pavillon continuera d’accueillir des expositions dans le cadre de l’Exposition du Canada central jusqu’en septembre 1939.  À ce moment, le ministère de la Défense nationale se l’accaparera pour en faire un centre de mobilisation et d’entraînement militaire de base, puis un centre de démobilisation.

Après la Deuxième Guerre mondiale, le pavillon Aberdeen retrouve sa fonction de hall d’exposition pour l’AECC lorsque l’Exposition du Canada central reprend ses activités en 1947.

En 1972, l’immeuble prend le nom de « Palais bovin », après que l’AECC commence à y tenir son exposition d’animaux.

En 1973, l’AECC cède l’exploitation du parc Lansdowne à la Ville d’Ottawa.  La Ville lance une première tentative de réaménagement du parc pour en faire une destination plus en vue. Il y en aura ensuite de nombreuses autres. En fait partie l’étude de nouvelles vocations pour le pavillon Aberdeen, qui dépérissait parce qu’il était négligé.

En juillet 1979, la commission d’urbanisme de la Ville approuve la recommandation du comité consultatif local pour la conservation de l’architecture voulant que le pavillon Aberdeen soit désigné en vertu de la partie IV de la Loi sur le patrimoine de l’Ontario (LPO).  Le conseil municipal vote toutefois pour reporter la désignation jusqu’à ce qu’une étude de faisabilité puisse être menée à bien.

Entre-temps, un appui croissant se manifeste en faveur de la préservation du pavillon.  En 1983, la Commission des lieux et monuments historiques du Canada désigne le pavillon comme lieu historique national.  La Ville d’Ottawa confirmera en février 1984 la désignation en vertu de la partie IV de la LPO.

À la fin de 1986, le pavillon Aberdeen est détérioré au point où il doit être condamné.  Il sera fermé au public en octobre 1987.

S’ensuivra ce qui a été décrit comme un « combat épique » pour sauver la structure monumentale.  Il durera sept ans et fera l’objet de multiples votes du conseil municipal.

L’avenir du pavillon Aberdeen semble assuré lorsque sa restauration est prévue dans le cadre d’un « mégaprojet » de réaménagement du parc Lansdowne.  Cependant, les coûts à prévoir grimpent bientôt à 82 millions de dollars.  Après des années de débats, le conseil vote le 7 août 1991 pour rejeter l’ensemble du projet et démolir aussi bien l’Édifice de l’horticulture que le pavillon Aberdeen, qui en étaient rendus à gâcher le paysage.

L’élection municipale de novembre 1991 leur apportera un sursis, car il était impossible de les démolir avant le vote.

Patrimoine Ottawa maintient la pression en organisant une manifestation de mobilisation pour préserver le pavillon Aberdeen, en décembre 1991, puis des conférences et des visites sur place ainsi qu’un rallye, en février 1992.  Des centaines de citoyens locaux signeront une pétition qui sera envoyée à l’hôtel de ville.

Le conseil municipal nouvellement élu approuvera en juillet 1992 une proposition de restauration plus modeste – portée par les conseillers municipaux Jim Watson et Peter Hume.

L’architecte en conservation Julian Smith est chargé de diriger la réhabilitation en 1993.  Les fonds nécessaires au projet de 5,3 millions de dollars sont obtenus grâce au Programme national de partage des frais pour les lieux patrimoniaux de Parcs Canada, à la Fondation du patrimoine ontarien et à l’AECC.

Magnifiquement restauré, le pavillon Aberdeen rouvre officiellement ses portes en grande pompe le 24 juin 1994.

En 2008, le conseil municipal approuve le projet de réaménagement du parc Lansdowne présenté par l’Ottawa Sports and Entertainment Group. Le pavillon Aberdeen est protégé par sa désignation en vertu de la LPO, son statut de lieu historique national et la servitude de conservation administrée par la Fiducie du patrimoine ontarien.

Patrimoine Ottawa n’a jamais fléchi dans sa volonté de sauver le pavillon Aberdeen.  Sa détermination est d’autant plus évidente que l’organisation a décidé en 2001 d’intégrer une représentation du pavillon dans son nouveau logo.

Élément phare du parc Lansdowne, le pavillon Aberdeen témoigne du patrimoine agricole d’Ottawa et reste un saisissant joyau urbain en bordure du canal Rideau, site du patrimoine mondial de l’UNESCO.